« Santé mentale et éco-anxiété : comment faire face psychologiquement aux changements climatiques ? »

« Santé mentale et éco-anxiété : comment faire face psychologiquement aux changements climatiques ? »

Quand le climat pèse sur la tête : reconnaître l’éco-anxiété 🧠

L’éco-anxiété, ce n’est pas “être trop sensible”, c’est une réaction normale à une situation anormale. Feux de forêt, canicules à répétition, sécheresses, inondations… Les changements climatiques ne sont plus un scénario de film catastrophe, ils s’invitent dans notre quotidien. Et notre mental encaisse.

Le terme éco-anxiété désigne l’angoisse, la peur ou la tristesse liées au dérèglement climatique et à la dégradation de l’environnement. Elle peut se traduire par :

  • une peur diffuse du futur (“À quoi ressemblera le monde dans 20 ans ?”)
  • un sentiment d’impuissance (“À quoi bon recycler si les gouvernements ne bougent pas ?”)
  • de la colère envers les décideurs, les entreprises, parfois son entourage
  • de la culpabilité (“Je prends encore l’avion, je suis nul·le…”)
  • un découragement profond qui peut mener au repli sur soi

Bonne nouvelle : ressentir tout ça ne fait pas de vous quelqu’un de “fragile”, mais de lucide. Votre cerveau enregistre une menace globale (le dérèglement climatique) et déclenche une alarme émotionnelle. Le problème, c’est quand cette alarme reste bloquée sur “on”.

Pourquoi notre cerveau bugue face au climat 🌍

Notre cerveau n’est pas programmé pour gérer une crise lente, mondiale et complexe comme le changement climatique. Il est conçu pour réagir à un danger immédiat : un bruit suspect, une voiture qui arrive, un feu dans la cuisine. Là, on sait quoi faire : fuir, agir, appeler à l’aide.

Avec le climat, tout est différent :

  • Le danger est partout et tout le temps : dans les infos, les réseaux sociaux, les discussions de famille.
  • Il est à la fois invisible et évident : on ne “voit” pas les gaz à effet de serre, mais on ressent les canicules.
  • On est à la fois victime et acteur : on subit le système, mais on y participe aussi.

Résultat : notre cerveau peut se retrouver coincé entre sidération, anxiété et suractivité mentale. On rumine, on scroll, on s’informe, on culpabilise… sans toujours savoir comment transformer ces émotions en actions supportables au quotidien.

Les signaux à ne pas ignorer 🆘

Un certain niveau d’inquiétude climatique est sain, mais certains signaux montrent que la charge mentale devient trop lourde. Soyons clair : il ne s’agit pas de s’auto-diagnostiquer, mais d’apprendre à repérer quand il est temps de demander du soutien.

  • Vous passez des heures à consulter des infos climatiques, et plus vous lisez, plus vous vous sentez mal.
  • Vous avez des difficultés à vous projeter dans l’avenir (enfants, carrière, logement) à cause du climat.
  • Vous ressentez souvent une boule au ventre, des insomnies ou des pensées en boucle sur “l’effondrement”, “la fin du monde”, etc.
  • Vous vous isolez parce que vous avez l’impression que “les autres ne comprennent pas” ou “s’en fichent”.
  • Vous alternez entre hyper-engagement et épuisement : pétitions, militantisme, lectures… puis burn-out climatique.
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Si vous vous reconnaissez dans plusieurs de ces signes, ce n’est pas un échec personnel. C’est le signal que votre système d’alerte est saturé et qu’il a besoin d’être régulé, comme on régule un feu trop intense.

Accepter ses émotions… sans se laisser engloutir 🌊

Vouloir “ne plus penser au climat”, c’est comme essayer de ne pas penser à un éléphant rose : ça ne marche pas. L’idée n’est pas de supprimer vos émotions, mais de les apprivoiser.

Quelques pistes pour commencer :

  • Nommer ce que vous ressentez : peur, tristesse, colère, honte… Mettre des mots sur vos émotions permet de réduire leur intensité. Vous pouvez écrire dans un carnet, en parler à un proche, ou même l’enregistrer en audio.
  • Normaliser votre réaction : non, vous n’êtes pas “bizarre” de pleurer devant un rapport du GIEC. Beaucoup de personnes ressentent la même chose, même si elles n’en parlent pas.
  • Différencier responsabilité et culpabilité : vous n’êtes pas responsable seul du système, mais vous avez un pouvoir d’action dedans. La culpabilité fige, la responsabilité mobilise.

Accepter vos émotions ne veut pas dire renoncer à agir, au contraire. C’est ce qui permet d’agir sans se détruire mentalement.

Apprendre à doser l’information : l’hygiène mentale climatique 📱

L’un des premiers gestes de prévention contre l’éco-anxiété, c’est de réguler votre exposition aux mauvaises nouvelles. Pas pour fermer les yeux, mais pour rester capable d’agir.

Quelques règles simples à tester :

  • Fixez des plages horaires “infos climat” : par exemple 20 minutes le matin, pas plus. Évitez surtout le doomscrolling le soir avant de dormir.
  • Choisissez 2 ou 3 sources fiables (médias spécialisés, newsletters, sites scientifiques) et évitez de sauter d’une alerte anxiogène à une autre sur les réseaux sociaux.
  • Pour chaque info inquiétante, cherchez une info sur les solutions : innovations, victoires juridiques, politiques publiques, mouvements citoyens. Votre cerveau a besoin de voir que des choses bougent.
  • Gardez des espaces “sans climat” dans votre journée : un film, une balade, un jeu, des moments où le cerveau se repose vraiment.
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S’informer est essentiel, se sur-informer est destructeur. Comme l’eau, c’est une question de dosage.

Transformer l’angoisse en action à votre échelle 🔧

L’éco-anxiété diminue souvent quand on trouve des façons concrètes d’agir. Pas pour “sauver la planète tout seul”, mais pour retrouver du pouvoir sur ce qui nous entoure.

Quelques pistes d’actions réalistes :

  • Agir à l’échelle de votre quotidien : alimentation plus végétale, moins d’avion, mobilité douce, sobriété énergétique… Pas pour être parfait, mais pour être cohérent avec vos valeurs.
  • Rejoindre un collectif : association locale, groupe de mobilisation, collectif de quartier, AMAP… On supporte mieux l’angoisse à plusieurs que seul derrière son écran.
  • Engager des conversations avec vos proches, collègues, voisins. Parler de climat, ce n’est pas faire la morale, c’est ouvrir des espaces de réflexion partagée.
  • Mettre vos compétences au service de la transition : graphisme, informatique, cuisine, communication, pédagogie, artisanat… Tout peut servir aux projets climatiques.

Le but n’est pas de cocher toutes les cases, mais de trouver le niveau d’engagement qui vous soutient, plutôt que de vous épuiser.

Prendre soin de soi pour mieux prendre soin du vivant 💚

S’épuiser pour la cause climatique ne sert ni le climat… ni vous. La transition écologique sera un marathon, pas un sprint. Pour tenir dans la durée, il faut intégrer l’écologie intérieure à l’écologie extérieure.

Quelques pratiques simples à intégrer :

  • Revenir au corps : marche, yoga, respiration, danse, jardinage… Le but est de sortir du tourbillon mental et de revenir à des sensations concrètes.
  • Se reconnecter au vivant proche : un arbre sur le chemin du travail, un square, un pot de basilic sur un balcon, un oiseau qui chante… Non, ce n’est pas naïf : c’est prouvé, le contact avec la nature réduit le stress.
  • Garder des moments de joie “gratuite” : jeux, humour, musique, soirées avec des amis où l’on parle d’autre chose. Le climat est sérieux, mais la vie ne peut pas être uniquement une suite de rapports du GIEC.
  • Appliquer la règle de l’oxygène dans l’avion : on met d’abord son propre masque avant d’aider les autres. S’autoriser du repos, ce n’est pas renoncer, c’est se rendre disponible pour durer.
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Prendre soin de sa santé mentale est un acte profondément écologique. Un esprit épuisé ne change pas le monde, il s’y résigne.

Quand demander de l’aide professionnelle 🩺

Parfois, l’éco-anxiété dépasse ce qu’on peut gérer seul ou avec ses proches. Dans ces cas-là, s’adresser à un·e professionnel·le de la santé mentale n’est pas un aveu de faiblesse, mais un acte de responsabilité envers soi-même.

Quelques situations où demander de l’aide est particulièrement important :

  • Vos pensées tournent en boucle sur le climat et vous empêchent de fonctionner normalement.
  • Votre sommeil, votre appétit ou votre énergie sont durablement perturbés.
  • Vous ressentez une perte de goût pour tout, même pour ce que vous aimiez auparavant.
  • Vous avez des idées noires récurrentes, même sans intention précise de passer à l’acte.

De plus en plus de psychologues et psychothérapeutes sont formés aux questions de climat et d’éco-anxiété. N’hésitez pas à préciser ce sujet lors de la prise de rendez-vous. Vous pouvez aussi vous tourner vers des groupes de parole, cercles de discussion, ou réseaux spécialisés dans l’accompagnement de l’éco-anxiété.

Et maintenant, on fait quoi… sans se perdre ? 🚀

Les changements climatiques vont continuer à bousculer nos vies, mais ils n’ont pas à détruire notre santé mentale. La peur peut devenir un moteur, si elle s’accompagne de lucidité, de solidarité et de soin.

Pour résumer, quelques repères à garder en tête :

  • Vos émotions liées au climat sont légitimes, vous n’êtes pas seul·e à les ressentir.
  • Vous avez le droit de doser votre exposition aux informations, sans “trahir la cause”.
  • Agir à votre échelle réduit le sentiment d’impuissance, même si ça ne “sauve” pas tout.
  • Prendre soin de vous n’est pas égoïste, c’est ce qui vous permettra de tenir sur le long terme.
  • Demander de l’aide est une option courageuse, pas un dernier recours honteux.

Le dérèglement climatique est un défi collectif, mais la façon dont vous en prenez soin dans votre tête et dans votre cœur compte tout autant. Prochaine étape possible : en parler à quelqu’un autour de vous, rejoindre un groupe engagé, ou simplement… prendre un moment dehors, respirer et vous rappeler que vous faites déjà une chose essentielle : vous vous souciez.